———— Trois morts subites en moins d'une demi-heure, ah ça part sévère les droits de succession. (Lino Ventura, Les Tontons flingueurs (1963), écrit par Michel Audiard) ———— Ça va changer vite, c'est moi qui vous le dis ; la boîte que je vais lui trouver, va falloir qu'elle y reste, croyez-moi! Ou sinon, je vais la filer chez les dresseurs, les vrais, pension au bagne avec le réveil au clairon et tout le toutim, non mais sans blague !? (Lino Ventura, Les Tontons flingueurs (1963), écrit par Michel Audiard) ———— Patricia, mon petit… Je ne voudrais pas te paraître vieux jeu ni encore moins grossier… l'homme de la pampa, parfois rude, reste toujours courtois, mais la vérité m'oblige à te le dire : ton Antoine commence à me les briser menu! (Lino Ventura, Les Tontons flingueurs (1963), écrit par Michel Audiard) ———— Je ne rêve pas en couleur, je ne rêve pas en noir, je ne rêve pas du tout, je n'ai pas le temps ! Lino Ventura, Les Tontons flingueurs (1963), écrit par Michel Audiard ———— Les cons, ça ose tout ! C'est même à ça qu'on les reconnaît. Lino Ventura, Les Tontons flingueurs (1963), écrit par Michel Audiard ——— —— Soirée arrosée avec Mitchum. Lors de leur première rencontre à Hollywood, au début des années 1980, son ami producteur Norbert Saada raconte que Lino Ventura a été très impressionné par la « descente » de l'acteur américain. Dans la soirée, Mitchum a bu à lui seul une bouteille de vodka avec six bières, deux bouteilles de vin rouge et du cognac. A tel point que Ventura a eu peur de se retrouver dans les gazettes le lendemain avec son nouvel ami complètement ivre. Les deux hommes se sont revus à Paris, puis au Festival du film policier de Cognac, et se sont entendus comme larrons en foire. Ils avaient un projet de film ensemble, mais Lino Ventura est mort trop tôt. Anecdote racontée par Clélia la fille de Lino Ventura dans le livre « Lino Ventura, carnet de voyages) —— Les Tontons flingueurs est devenu un Film cultissime, y compris chez les Bobos qui le snobaient à sa sortie en 1963, Les Tontons Flingueurs ont permis à Lino d’interpréter un personnage conçu initialement pour Jean Gabin, celui de Fernand Naudin, un ancien truand «reconverti dans l’honnête». Alors jeune réalisateur, Lautner se souvient de sa première scène avec Lino Ventura : «Je lui ai dit d’aller de là à là, de dire ça, de se retourner et de faire trois pas. Il m’a demandé "Pourquoi trois ?" Et là, mon système a commencé à se dérégler (…) Il a alors fait ses quatre pas avec tout son poids et il m’a tout foutu en l’air ! Lino m’a appris à improviser et comme on avait envie de le suivre, comme il était vraiment instinctif, ça sortait comme ça, aussi bien derrière que devant la caméra ! » Lautner le reprendra l'année d'après pour Les Barbouzes. Anecdote racontée par Clélia la fille de Lino Ventura dans le livre « Lino Ventura, carnet de voyages) ——— Dans L’Emmerdeur, Lino joue le rôle d’un tueur professionnel, Ralph Milan, qui ne peut travailler parce que, dans l’hôtel d’où il doit tuer sa cible, un représentant en chemises nommé Pignon (Jacques Brel), veut à tout prix se suicider… Le plus drôle dans ce film, c’est la réaction de Lino après l’avoir vu en projection privée : catastrophé ! Il l'a trouvé mauvais de bout en bout et, surtout, pas drôle pour deux sous ! Lors de la sortie de L'Emmerdeur en salles en septembre 1973, craignant les réactions défavorables du public, Lino a quitté Paris pour l’Anjou… Mais après minuit, n’y tenant plus, il téléphone au producteur Alexandre Mnouchkine, lequel le surprend agréablement : « Lino, c’est un triomphe ! C’est inimaginable ! Les applaudissements, les hurlements de rire, la joie… » Et Lino Ventura de répéter une petite phrase qui peut - aussi - servir en cas d’échec : «Ben, merde alors !» Anecdote racontée par Clélia la fille de Lino Ventura dans le livre « Lino Ventura, carnet de voyages) ——— Saint-Paul de Vence et le cinéma : Place de Gaulle et le Café de la Place : il suffit de sortir de la Colombe d’Or et de traverser la rue pour rejoindre la place de Gaulle. Cette « place du jeu de boules » et le Café de la Place qui la borde ont constitué le « terrain de jeu » favori de beaucoup d’acteurs de cinéma. Yves Montand, Georges Géret, Line Renaud, Bernard Blier y ont joué des parties de boules disputées. Quant à Lino Ventura, il ne délaissait la pétanque que pour jouer à la belote au Café de la Place avec ses amis saint-paulois. ——— Cinquante-trois ans après avoir joué Pascal, Venantino Venantini se souvient, depuis Rome, des Tontons flingueurs. Dans votre livre de souvenirs (Le Dernier des Tontons flingueurs - Michel Lafon), vous dites que vous ne saviez pas, en allant tourner, si ce serait un nanar ou un chef-d'oeuvre... Pas seulement moi, Lino Ventura ne voulait pas tourner ce film. Il n'était pas très emballé, il voulait garder son image d'homme sérieux, respectable, à la Gabin, dont il voulait être le successeur. Et puis, doucement, il s'est pris au jeu avec les dialogues de Michel Audiard et le réalisateur Georges Lautner. Était-ce votre premier film en France? C'était mon premier long métrage. [L'acteur venait de jouer un vampire dans un court métrage français intitulé Fantasmagorie, ndlr.] C'est mon agent qui m'a envoyé. J'avais aussi besoin d'argent... C'était une grande époque de coproductions franco-italiennes. Même si je suis venu quelques années plus tôt à Paris étudier la peinture à l'École des beaux-arts, je parlais mal le français et on m'a fait doubler par un Yougoslave. Au cours du tournage, êtes-vous devenus une vraie bande? Chacun était soi-même, mais on faisait tous UN, c'est ça qui était formidable. Audiard était là sans arrêt, il s'amusait lui aussi. Lautner, c'était un bijou de metteur en scène. Sa gentillesse, sa douceur et sa tranquillité prouvaient sa maîtrise. C'était le capitaine de cette équipe de fous. On rigolait tous les jours. On parlait beaucoup de bouffe avec Lino, qui était d'origine italienne et avec qui je m'entendais très bien. Bernard Blier s'interposait entre nous pour savoir de quoi on parlait. Il y avait sans cesse des blagues et des calembours, c'était très drôle. Connaissiez-vous les autres Tontons? Non, j'ai découvert Francis Blanche, qui était formidable. Il était très amoureux d'une fille italienne qui habitait à Rome, alors il m'en parlait tout le temps. Il était toujours très emballé par les filles. L'autre qui me faisait mourir de rire était Jean Lefebvre, avec son visage impossible. Il claquait beaucoup de pognon au jeu... Avez-vous été surpris ensuite du succès de ce film devenu culte? Il y a quelques années, j'ai été invité à Lyon avec mon ami regretté Georges Lautner pour une projection spéciale dans les arènes. Quel triomphe! Tout le monde connaissait les répliques par coeur. On ne s'attendait pas à ça. Je n'ai jamais vu ça de ma vie. Les gens nous jetaient des coussins, des fleurs.... Incroyable! Une hystérie collective! Georges avait la larme aux yeux. Et puis, un papa m'a montré à sa jeune fille: «C'est lui, le tonton»! Comme s'il avait vu Jésus-Christ... Vous êtes à l'affiche de Marseille, le film de Kad Merad... Il me voulait absolument, parce que lui aussi est fan des Tontons flingueurs! Dans son film, je joue son père, qui a perdu la mémoire. C'est drôle, mais ce n'est pas qu'un film comique, c'est une histoire très touchante, mélancolique. Propos recueillis par Jean-Marc Barenghi pour le Figaro - 2016